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Sorti de rien – un récit d’Irène Frain

Sorti de rien est une expression communément utilisée par ceux et celles qui méconnaissent la richesse du monde du rien, si cher au cinéaste Ozu. Mu, le rien constant, est l’épitaphe qu’il a choisi. Rien, c’est aussi comme si on vous disait que votre merveilleux jardin occupait désormais une ancienne friche, où il n’y avait rien. Or c’est faire abstraction de la vie souterraine avec ses millions d’animaux transformant la terre et ces milliards de graines qui n’attendent qu’à pousser. C’est aussi balayer d’un revers de main le genius loci. Ce n’est pas parce qu’on ne voit pas les choses, qu’elles n’existent pas.

Irne Frain

Invitée par la bibliothèque Lucien Rose de Rennes, Irène Frain, écrivain et journaliste, converse devant un public de lectrices. Radieuse, lumineuse, elle jongle avec les mots.
Crédit photographique : © 2017 Véronique Samson

 

Sorti de rien, c’est aussi le récit tramé, tissé savamment par Irène Frain. Telle une archéologue, elle fouille la mémoire du lieu, la mémoire familiale. Elle enquête prudemment, soigneusement et rassemble les fragments épars, distillés goutte à goutte par un père taiseux pour reconstituer son héritage, voire corriger une version faussée par la honte et la fierté. Dans une Bretagne peuplée de blancs, de rouges et de noirs, l’auteur nous fait humer la terre humide, le bois et la brume. Elle fait jaillir de la mémoire des personnages forts, qui ont développé une capacité de résilience phénoménale pour faire face aux clivages de l’époque, entre ceux qui vivent sur la bonne rive du Stang Ihuern et ceux du mauvais côté. Irène Frain, porte parole des réprouvés, des exclus, des méprisés, nous livre ici encore un récit sensible, profond et fascinant. Elle nous fait partager ses secrets de famille avec élégance et grâce.

Sorti de rien, Irène Frain – publié au Seuil, 2013

A lire aussi : Les Naufragés de l’île Tromelin, publié chez Lattes, 2009

 

D’ETONNANTS VOYAGEURS DEBOUSSOLES

Au cours des débats littéraires de ce week end, les visiteurs du festival Etonnants Voyageurs ont dû être parfois perturbés voire déboussolés. Et il y a de quoi !

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D’une part, le géographe Cédric Gras nous annonce que le Nord est à l’Est. D’autre part, le scénariste et dramaturge, Jean Claude Carrière avoue qu’il ne sait pas où est l’Orient !

Cartographie ancienneExposition sur la cartographie à l’ENSM de Saint Malo. Portulans, cartes et planisphères du XVIe au XVIIe siècle invitent au voyage. Atlas de Théodore de Bry. Crédit photographique : © 2013 Véronique Samson

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Ecrivain voyageur, Cédric Gras sillonne les régions éloignées de la Confédération de Russie. Il présente son dernier livre édité chez Phébus : « Le Nord est à l’Est – Aux confins de la Fédération de Russie ».  Au cours de ses pérégrinations, il constate que les points cardinaux ne sont pas aussi figés qu’il y parait. Pour beaucoup, s’il fait froid, la région appartient au Grand Nord même s’il s’agit d’une zone située au Sud.

Quant à l’Orient, contrairement à l’Occident, il est plus difficile de le définir. Il existe le Proche Orient, le Moyen Orient et l’Extrême Orient. Alors où est l’Orient dans tout cela, se demande Jean Claude Carrière. Il n’est pas donc pas aisé de comprendre les différences entre le roman en Occident et en Orient, termes génériques qui peuvent regrouper beaucoup de choses.

Par contre, avec ses Nouilles froides à Pyongyang, le journaliste Jean Luc Coatalem  déguisé en agent de voyage, nous promène dans un monde étrange, plein de chicanes, où ce qui est montré, n’est qu’un décor. Bien que ce monde semble en dehors de toute cartographie, là, nous savons bel et bien que nous sommes en Corée du Nord.